"Dis-moi que tu ne m'as jamais aimé."

"Dis-moi que tu ne m'as jamais aimé."

"Deux choses ne se peuvent cacher : l'ivresse et l'amour."

Paul Claudel

 

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« Annyeong Xuiminnie ! Bien dormis ? Je t’ai apporté un thé avec du miel, tu as dit que tu avais mal à la gorge hier, non ?! Je te le laisse sur la table, bois le quand tu te lèves, arraseo ?! »

 

Je lançais un grognement d’en dessous de ma couverture et attendis d’entendre le bruit de la porte de ma chambre se refermer avant de m’aventurer à sortir la tête de sous l’oreiller.

C’était ainsi tous les matins et ce depuis bientôt plus d’un mois. Luhan trouvait toujours une excuse pour être celui qui viendrait me réveiller.

Mais si ce n’était que ça … Cette intrusion journalière dans ma chambre n’était que le début de longues journées en compagnie du chinois. Je ne saurais pas vraiment dire quand exactement ce garçon s’était pris d’affection pour moi, mais soudainement ou alors peut être doucement sans que je m’en rende compte, Luhan avait commencé à passé tout son temps avec moi. Ce n’est pas pour me déplaire car c’est un garçon très gentil, drôle et incroyablement adorable, cependant je commençais quelque peu à me lasser de son invasion constante dans mon espace vital.

Déjà que lorsque les membres du groupe étaient venu vivre tous ensemble dans le dortoir j’avais du me faire au manque de vie privée, mais depuis que Luhan restait avec moi c’était presque impossible de trouver un moment de solitude. Je me sentais quelque peu étouffé par toutes ses petites attentions qui finissaient même par me mettre mal à l’aise. 

 

D’un autre côté je m’étais rendu compte que j’avais pris l’habitude de ce comportement. Et quand je voyais Luhan repartir à sa première forte amitié du groupe : Sehun, je me prenais à être quelque peu agacé. « Est-il une girouette pour du jour au lendemain changer de passion ainsi ? Un moment il me prenait dans ses bras, le moment d’après il rigolait à gorge ouverte avec Sehun … Il fallait savoir ce qu’il voulait, je n’avais pas supporté son intrusion dans ma vie pendant tout ce temps pour qu’il s’en aille juste après, retrouver son super pote Sehun … »

Mais il est vrai que le rituel du matin échappait à cette règle : le seul rendez-vous que Luhan ne manquait pas depuis un mois déjà, c’était celui de 6h35, lorsqu’il venait me réveiller pour m’inviter à me préparer pour la journée de travail qui nous attendait. Et ça, Sehun ne pouvait pas me l’enlever.

 

Je me relevais et jetais un oeil sur le bureau placé contre le mur qui faisait face à mon lit, sur ma droite. Un petit plateau y trônait fièrement, remplit d’une petite théière, d’une tasse, de quelques uns de mes gateaux de riz préférés et du petit mot habituel. Je passais une main dans mes cheveux d’un rose poudré tout en me mettant sur pieds. Je marchais nonchalamment jusqu’à la table et prenait entre mes doigts le petit morceau de papier sur lequel était inscrit les mêmes mots auxquels j’avais le droit tous les matins :

« Annyeonghaseo Hyung-nim !! 

Fighting pour cette nouvelle journée de travail~~

Lulu ♡ »

Bien que nous soyons de la même années et que je ne sois plus vieux que de seulement vingt-cinq jours, il insistait pour m’appelait hyung, ce qui me faisait sourire.

D’une main distraite, sans faire attention à ce geste habituel, j’ouvrais une boîte qui était toujours sur mon bureau et y rangeait le mot, après l’avoir plié en deux, avec ses 30 petits frères. Bien que chaque mot dise la même chose, j’avais gardé chacun d’entre eux sans trop savoir pourquoi. 

J’avalais un gateau de riz, trois gorgées du thé sucré par le miel et rejoignais ma penderie pour m’habiller. 

 

Une fois prêt, je rejoignais le grand salon-salle à manger et sa cuisine à l’américaine où presque tout le monde était déjà, assis à table. En entendant mes pas, quelques têtes se tournèrent vers moi et m’accueillirent d’un sourire, je remarquais que Luhan n’était pas encore là et m’en étonnais, mais ne dis rien. Tao leva la tête de son bol et m’invita d’un geste à m’asseoir :

« Hyung ! Viens vite déjeuner, Suho-hyung a dit que nous partirons plus tôt ce matin pour un photo-shooting. » 

Je penchais légèrement la tête en sa direction pour le remercier de son attention avant de lui répondre.

« Merci mais je n’ai pas faim ce matin … 

- Quoi ? mais il faut que tu manges hyung ! Tu es malade ? Tu ne refuse jamais un repas d’habitude ! »

La voix inquiète dans mon dos était bien sure celle de Luhan, mon « ange gardien ». L’expression d’inquiétude extrême sur son visage quand je me retournais vers lui me fit fondre un instant : ce garçon était trop attentionné. Mais je décidais sans savoir pourquoi de réagir à l’encontre de ce que je pensais et me mis à froncer les sourcils.

« Mais non, je vais très bien, rater un seul repas ne me fera pas de mal ! Arrête de te mêler toujours de mes affaires ! »

Mon ton agressif en surpris plus d’un et moi en premier. Je n’étais pas quelqu’un qui s’emporte aussi facilement, ni du genre à s’en prendre sans raison à quelqu’un comme ça. Mais j’avais remarqué que depuis quelques jours je n’arrivais plus à être aimable et souriant en compagnie de Luhan.

Mes joues se mirent à rosir légèrement de honte car j’avais vraiment été rude. Mais plutôt que de m’excuser, mon corps choisit de partir se réfugier dans ma chambre alors que ma tête me criait que j’avais été injuste. Je ne repointais cependant plus le bout de mon nez avant qu’il ne soit l’heure de partir.

 

En rejoignant les vans pour nous rendre à notre activité de la journée, en passant devant la chambre de Kyungsoo, je l’entendit parler avec Luhan à mon sujet.

« Je m’inquiète pour Minseok, il est bizarre ces derniers jours et il n’a pas mangé ce matin … peut-être qu’il a des soucis mais qu’il n’ose pas en parler avec nous …

- Peut-être … j’ai remarqué son comportement, mais ce qui m’inquiète le plus c’est sa façon de te parler, ça ne lui ressemble pas de parler méchamment comme ça …

- Ah, ça … Ne t’inquiète pas, s’il allait bien il ne parlerait pas comme ça, c’est juste parce qu’il est à cran et comme je suis proche de lui, il se décharge sur moi.

- Si tu le dit … »

En entendant leurs pas se rapprocher, je réalisais que je m’étais arrêté pour écouter à travers l’embrasure qu’avait laissé la porte entrouverte. Je me précipitais hors du dortoir pour ne pas être vue : « Voilà que j’écoute aux portes maintenant … » Moi-même, je ne me reconnaissais plus. 

Je m’installais dans l’un des deux vans qui attendaient patiemment devant l’immeuble, en prenant soin de m’asseoir entre la fenêtre et Baekhyun et Chanyeol afin que Luhan ne puisse pas s’asseoir à côté de moi. Cependant il vint s’asseoir dans mon van, devant moi, en compagnie de Sehun. En voyant la tête blonde de ce dernier à ses côtés, la moutarde me monta au nez : « Pourquoi faut-il qu’à chaque fois qu’il n’est pas avec moi il aille avec lui ? Ne suis-je qu’un bouche-trou ? » Cela me mettait hors de moi.

Quand Luhan s’aventura à se retourner pour me lancer un regard, je mis sauvagement mes écouteurs dans mes oreilles pour le dissuader de me parler, tout en arborant l’expression la plus neutre que je pouvais fournir à ce moment là. Il me fit un petit sourire triste plein de déception mais aussi de compréhension avant de se retourner vers son ami et passer le trajet à parler et rigoler avec lui. Le lieu du shooting photo étant en dehors de la ville, j’eu tout le temps de me faire torturer par ces deux bourreaux, jusqu’à l’énervement extrême. Mes sourcils étaient tellement froncés que les maquilleuses auraient surement du fil à retordre pour effacer mes rougeurs et me lisser le teint. 

 

Le photo-shoot d’aujourd’hui était pour notre nouvel album : Overdose. Nous nous étions déplacé jusqu’au studio d’un photographe de renommée pour cela. Aussitôt après avoir été présentés à ce dernier et devant le sérieux de l’événement, je laissais de côté mes histoires personnelles pour me concentrer sur la réussite du shooting. Les stylistes et les maquilleuses se sont très vite mises en action pour préparer, installer le matériel, sortir et repasser nos vêtements … tout ce monde si important qui restait dans l’ombre des coulisses lorsque nous brillions sur scène, s’affairait pour nous assurer de belles photos et nous supporter dans notre travail. 

Très vite, les premiers membres habillés s’installèrent devant les miroirs pour être maquillés et coiffés. Pendant ce temps, nous ne pouvions qu’attendre : pas la peine de se préparer trop tôt, les photos n’étaient qu’individuelles et le temps que les premiers soient pris en photo nous pourrions froisser nos vêtements ou transpirer et massacrer le travail de nos précieuses maquilleuses. 

Meeyon me fit signe de la rejoindre au portant à vêtements et me tendit un cintre sur lequel était pendu des vêtements houssés avec dessus une étiquette sur laquelle était écrit « Xiumin ».

« Tiens Minnie, voilà tes vêtements, habilles-toi et reviens me voir pour que je vérifie les retouches qu’on a fait la dernière fois. Fais attention, les coutures sont fragiles, si tu les casse je te tue, arraseo ?! »

Je lui sourie et hoche la tête sagement. Meeyon était vraiment ma styliste préférée. Derrière ses airs sévères et antipathiques elle était dévouée à son travail, faisait attention au moindre détail pour toujours nous montrer sous notre meilleur jour et était attentionnée et très stressée. 

Une fois vêtu de mes apparats, je sorti de la cabine d’essayage et la rejoignit. Elle se prit le bas du visage dans une main, l’autre bras croisant sa poitrine, la tête penchée pour évaluer la tenue, le tout dans une expression de concentration que Minseok affectionnait.

« Ça ne va pas, il faut encore retoucher la taille … Tu as encore maigrit Minnie ! Au point où on en est je vais te chercher une taille en dessous ! Haewon, regardes si la chemise de Baekhyun n’est pas plus petite … je crois qu’on lui avait préparé deux options, il n’aura qu’à prendre la chemise au col blanc. »

L’assistante hocha la tête, reparti fouiller dans le portant et revint avec une autre chemise noire. Je l’essaya et Meeyon me fit garder celle-ci. Bien qu’étant très légèrement plus petit que Baekhyun, j’avais toujours été plus lourd que lui et un peu plus rond, mais c’est vrai que ces derniers temps même mes joues rebondies avaient fondues et mes vêtements m’allaient plus grand.

Je me retournais pour rejoindre un des sièges qui faisaient face aux miroirs et me retrouvais nez-à-nez avec Luhan qui libérait justement la place. En le voyant j’eu un petit mouvement de recule sous la surprise : il était habillé, maquillé, coiffé et était magnifique. C’est peut-être la chose qui me fascinait le plus chez ce garçon, sa beauté irréelle. Il avait des traits très fins qui ressemblaient à ceux d’une fille et le trait d’eyeliner qu’il arborait faisait encore plus ressortir sa féminité. Ses cheveux châtains avaient été bouclés ce qui le rendait adorablement charmant et ses vêtements d’un blanc immaculé le faisait paraître être un ange tombé du ciel.

Je clignais des yeux pour reprendre mes esprits et sans un mot ni un regard supplémentaire, prenais sa place, sentant encore la trace de la chaleur de son corps sur la chaise.

« Tu as chaud Xiumin ? tu es tout rouge … tu peux enlever ta veste pour le moment … »

 

Le concept de ce photo-shooting était tourné vers la classe et l’élégance. Le photographe nous faisait poser derrière une table à la surface réfléchissante tel un miroir et le résultat était assez incroyable. Du coin de l’oeil, je pouvais voir que les photos de Luhan était un franc succès et j’en étais heureux pour lui. À vrai dire il brillait littéralement devant l’objectif et, pour sure, c’était lui le roi du shooting aujourd’hui.

Mais à peine le photographe le libérait, il ne prenait même pas la peine de se changeait, qu’il allait directement voir Sehun qui était lui aussi déjà passé. Il était avec Jongdae et Yixing et tous quatre partirent dans une conversation enflammée et passionnée alors que Suho me laissait sa place devant l’objectif. C’était à mon tour de me faire photographier et Luhan ne prenait même pas la peine de m’accorder un seul regard, trop occupé à rire aux blague de Sehun.

« Xiumin, ne fronce pas les sourcils comme ça il faut que tu aies une expression plus neutre et noble, sereine. »

Trop occupé à regarder leur petit groupe discuter je ne m’étais même pas rendu compte que j’étais en train de ruiner mon photo-shoot. J’écoutais donc les conseils du photographe et me concentrais sur ma pose. Cependant, dès que j’en eu la possibilité, j’alla me changer et remettre mon sweat à capuche sous laquelle je me cacha immédiatement. Je passais devant les quatre de tout à l’heure qui avaient été rejoins par Suho et lançais un regard mauvais sur le dos de Luhan sur ma droite. Je me dirigeais vers la sortie du bâtiment et allais prendre l’air pour contrôler ma colère. Mais à peine avais-je mis un pied sur le béton de l’allée faisant face au studio, qu’une voix m’appelait derrière moi. Je tournais la tête et voyais l’objet de mes préoccupations trottiner en ma direction, le sourire au lèvre, d’une façon incroyablement adorable. 

Sans prévenir, il vint m’enlacer par derrière, ses bras autours de ma poitrine et son menton sur mon épaule.

« Baozi-hyung ! Tu as été super ! Que j’aimerais pouvoir avoir l’air aussi viril que toi sur les photos … »

Je retins mon coeur de faire un raté. Son visage était très proche du mien et en plus il me disait que j’étais viril … J’avais du mal à ne pas rougir. Je libérais ma poitrine de l’emprise de ses bras et me retournais.

« Ne m’appelle pas Baozi … ni hyung, on a le même âge. »

J’essayais de me montrer sévère mais avec peine. Je pouvais sentir mes sourcils se froncer à nouveau sous l’agacement de ma propre impuissance.

« Hyung … tu es en colère ? »

J’avalais ma salive difficilement face à ses yeux de biche devenu tristes.

« Et puis comment peux-tu dire ça … tu ne m’as même pas regardé ! » Dis-je tel un enfant sans oser le regarder à nouveau.

« Bien … Bien sur que si Hyun- » Balbutia-t-il surpris avant que je ne le coupe.

« Non, je t’ai regardé, tu faisais que de papoter et rire avec Sehun, à cause de toi j’ai faillit rater mes photos … » Continuais-je toujours regardant partout sauf en sa direction, les bras croisés sur ma poitrine.

Il ne répondit pas de suite ce qui me fit jeter un oeil rapide sur lui. Il regardait le sol comme réfléchissant et faisant des déductions dans sa tête, puis il devint sérieux et me regarda avec assurance et détermination.

« Pardonne-moi hyung ! La prochaine fois je ferais plus attention et ne lâcherais pas mon hyung du regard de tout le photo-shoot ! » Il se prosterna en signe d’excuse et rajouta : « Je serais plus attentif à l’avenir, je te le promet Minseok-hyung ! »

Surpris, je n’arrivais plus à parler. Je ne m’attendais pas du tout à une telle réaction et étais touché devant sa dévotion, bien qu’elle m’inquiétait d’un autre côté. Il me lança l’un de ses sourires radieux et m’attrapa par le bras pour me ramener à l’intérieur. Il m’avait tellement abasourdi que je ne trouvais plus d’argument pour refuser et le laissais m’emporter. Le reste du shooting, je le passais donc assis à ses côtés à regarder les autres membres se faire photographier, mon bras capturé par le sien. Il ne lâcha d’ailleurs plus ce dernier jusqu’à ce que l’on soit rentrés au dortoir, lui ayant servit d’oreiller tout le trajet jusque là-bas.

 

Bien que nous changions souvent de chambres, j’avais l’habitude de dormir dans la même chambre et partager mon lit avec Jongdae. Nous avions réuni, comme pour la plupart du dortoir, les deux lits pour en former un seul, plus grand et plus conviviale. Cependant, ce soir là, il choisit de dormir dans le salon car sa gorge douloureuse et son nez coulant lui indiquait qu’il couvait peut-être quelque chose.

« La climatisation du studio était très forte aujourd’hui … je crois que j’ai pris froid. » Expliqua-t-il.

C’était donc seul que je me couchais ce soir là après avoir avalé une petite portion de ramens. Je n’étais pas mécontent d’avoir plus de place pour dormir, mais la présence de quelqu’un à mes côtés pendant la nuit me manquait et mon sommeil en était difficile.

Au beau milieu de la nuit, je sursautais en sentant une main me secouer l’épaule avec douceur et hésitation. Debout, à côté de mon lit, se tenait un Luhan en t-shirt et caleçon, effrayé, les yeux brillants, serrant contre lui une peluche de bambi. 

« Hyun … Hyung … »

Il semblait sur le point d’exploser en sanglots, je me relevais à la hate, soudain très inquiet.

« Qu’est-ce qu’il y a Luhan ? Tu es blessé ? Pourquoi tu pleures ? Qu’est ce qu’il s’est passé ? »

Je parlais très vite tout en attrapant ses épaules et cherchant du regard une blessure sur son corps.

« N-Non … je … j’ai fait un-un-un cauchemar … tu … tu étais … tu respi … plus … »

Il prononçait ces mots entre trois sanglots et je soufflais de soulagement retrouvant mon propre calme, mais je tentais quand même de le calmer et le rassurer.

« C’est rien, c’est fini, ce n’était qu’un rêve. Quoique c’était, c’est fini, tu n’as plus à avoir peur … »

Je me dressais pour me mettre à genoux sur mon lit et passais une main rassurante dans se cheveux puis d’un geste du pousse essuyais l’une de ses larmes tandis que ses épaules se soulevaient au rythme de ses reniflements.

« Tu veux venir dormir avec moi ? » Lui demandais-je de la voix la plus rassurante que je pouvais. Il hocha la tête affirmativement avec énergie et ne se fit pas prier deux fois avant de prendre la place que je lui laissais à mes côtés.

Je m’allongeais à nouveau et le laissais se blottir contre moi, sa tête se logeant dans mon torse. Je posais des bras protecteurs autours de lui et senti sa respiration peu à peu revenir à la normal, puis devenir lente, effaçant tout sanglot. Cette fois-ci il était vraiment impossible pour moi de m’endormir et je me contentais de fixer le mur en face de moi tout en caressant les cheveux de Luhan.

Tout d’un coup je senti un baiser se déposer juste en dessous de ma clavicule. Je jetais un regard curieux au crâne de Luhan, les joues rougissantes. Et sa petite voix émergea de sous mon menton.

« Merci hyung-nim … »

Je souri et resserra mon étreinte sans répondre, posant ma joue sur sa tête et laissant le sommeil m’emporter.

 

Le soleil qui filtrait entre mes rideaux vint se poser sur mon visage, forçant mon réveil. J’étais étendu sur le dos au travers du lit et personne avec moi. Si je me réveillais tout seul et que Chen n’était pas à côté de moi, c’est qu’il devait être tard … « Ah mais c’est vrai, Jongdae a dormi dans le salon … mais que fait Luhan, il ne vient pas me réveiller ? »

Luhan ! Il était venu dormir avec moi cette nuit … mais il n’était plus dans le lit …

J’ouvrais de force mes yeux tout en me relevant en sursaut, mais la lumière du soleil me força à les refermer aussitôt. J’attendit que la douleur se calme, assis dans mon lit, avant de les rouvrir doucement et constater que Luhan avait bien quitter le lit. Sans savoir pourquoi, cette nouvelle m’attrista et je me senti quelque peu trahit : « Il est parti et n’est même pas venu me réveiller … Quel ingrat ! » 

Dans ma frustration je me rallongeais et criait mon mécontentement dans ma tête. J’attrapais un morceau de couette et l’attirais à moi pour l’encercler de mes bras et mes jambes, me tournant sur le côté comme enlaçant un corps imaginaire avec force. « … Quel ingrat … »

Je n’entendis pas la porte s’ouvrir dans mon dos et ne réalisa l’intrusion d’un membre dans ma chambre qu’en entendant le bruit significatif du plateau qu’on pose sur mon bureau. Je tournais la tête et retenais ma joie d’apparaître sur mon visage en voyant mon chinois debout devant mon bureau, arrangeant la théière sur le plateau qu’il m’avait apporté. Il était déjà lavé et habillé, ses cheveux noués dans un petit chignon sur le haut de sa tête, comme j’aimais qu’il les coiffe. Il se tourna vers moi et fut surpris de me voir réveillé. Je fit mine de bouder :

« Tu es déjà prêt, pourquoi tu m’as pas réveillé et t’es parti comme un voleur … »

Je fit la moue et louchais sur une peluche invisible de la couette que je m’affairais à enlever maladroitement en tripotant le bout de tissus d’une main.

« Désolé hyung, mais Kris a dit qu’aujourd’hui nous avions une journée de repos alors je me suis dit que je te laisserais dormir plus longtemps … » Il s’assit sur le lit à côté de moi. « Mais ne t’inquiète pas hyung, j’allais revenir comme tu vois. » Il me sourit avec bienveillance et je lui rendit son sourire avec timidité. Il regarda dans le vide quelque peu gêné et souffla. Pour casser le malaise, je me relevais et encerclais son torse de mes bras. Je pris ma voix d’enfant et lui demanda en gonflant mes joues de façon mignonne :

« Luhan, j’ai sommeil, recouche toi avec moi, je veux pas dormir tout seul … »

Il eu l’air ravi que je lui demande et sourit des yeux en hochant la tête. Il alla fermer la porte, tirer les rideaux et vint s’allonger à côté de moi. Nous étions tous-deux sur le dos, l’un contre l’autre, nos bras nous touchant et observant le plafond. Au bout d’un moment je senti les doigts timides du chinois se glisser dans ma main pour l’agripper. Mes joues rosirent mais je le laissais faire tandis qu’il inclinait sa tête pour qu’elle repose sur mon épaule et je finissais par moi aussi poser ma tête contre la sienne.

 

Après cela, Luhan déménagea et vint dormir avec moi tous les soirs. Mais étrangement c’est Jongdae qui demanda à échanger leurs chambres disant qu’il voulait dormir avec Sehun car je ronflais. Bien qu’après avoir demandé à Luhan si je ronflais vraiment et qu’il m’ait dit qu’il ne s’en était pas rendu compte, j’accepta sans broncher la requête de Chen.

À vrai dire Luhan était un bien meilleur compagnon de chambre : comparé à Jongdae, il n’avait pas la sale habitude de prendre toute la place ou bien de me voler la couette. Mais puisque mon nouveau colocataire dormait dans mes bras chaque nuit, de tels problèmes ne se posaient pas. Bizarrement, je me surpris même à mieux dormir et de ce fait, à retrouver l’appétit.

Luhan continuait à m’apporter mon plateau tous les matins, mais maintenant me réveillait juste avant de sortir du lit. Une routine avait d’ailleurs pris place : il me réveillait doucement en secouant mon bras, je me réveillais mais faisait comme si je ne l’étais pas ; il finissait par me caresser la joue et j’ouvrais les yeux ; il m’accueillait avec un grand sourire, me disait bonjour et rajoutait un « il est l’heure de se lever ! » ; je refermais les yeux et grognais en marmonnant que je ne voulais pas me lever tout en l’attrapant dans mes bras pour l’empêcher de partir ; il riait de son rire cristallin qui me faisait toujours sourire et me caressait la tête avant que je ne le lâche et le laisse aller prendre sa douche ; puis j’attendais qu’il revienne, habillé, sentant bon le savon, mon plateau entre ses mains. J’aimais cette routine, c’était un bon réveil. Rien à voir à quand j’appréhendais sa venue, caché sous ma couette. Maintenant j’aimais qu’il me réveille, comme j’aimais m’endormir en le serrant dans mes bras.

 

Un matin, alors que Luhan me réveillait comme à son habitude en me secouant gentiment l’épaule, je me senti encore moins d’humeur que d’habitude. Je savais que nous allions encore avoir une lourde journée de répétition de la chorégraphie pour le nouveau MV, j’étais encore fatigué et courbaturé de la répétition de la veille, sans parler que j’avais toujours du mal avec un certain nombre de pas de danse. Je ne voulais tout simplement pas me lever. Alors, ma première réaction au réveil fut de grogner de mécontentement. 

« Aller la Belle au bois dormant, on se réveille ! Palli ! »

Luhan me secoua un peu plus fort en me parlant doucement. Bien que sa voix soit un délice à l’oreille, cela n’était pas suffisant pour me motiver : si je ne voulais pas me lever, il ne se lèverait pas non plus. J’attrapais et enroulais mes bras avec ferveur sa taille, la serrant fort contre moi et blottissant ma tête dans son torse, tout en poussant un petit rugissement digne d’un enfant capricieux. Il poussa une exclamation de surprise avant de rire d’un ton léger.

« Enfin, Hyung, soit raisonnable, nous avons une longue journée devant nous, c’est pas le moment de traîner au lit. »

Il commença à me caresser délicatement les cheveux et les joues pour m’encourager mais rien n’y fit, je ne bougeais pas. Il continua encore un instant avant de réaliser que ce matin, ça ne marchait pas.

« Hyung … je dois aller me doucher … »

Il tenta de se libérer de mon étreinte mais j’étais plus fort que lui. Je sentais qu’il commençait à être agacé et sa voix perdit de sa douceur.

« Bon ça suffit ces enfantillages, Xiumin, lâches-moi. »

Il ne m’avait pas appelé hyung, ça voulait dire qu’il allait s’énerver. Je sortais la tête de sa poitrine et fronçais les sourcils en faisant ma moue la plus adorable tout en prenant soin de gonfler mes joues : il adorait mes grosses joues briochées.

« Je ne veux pas me lever Luhan et je ne veux pas que tu partes … » Je décidais d’un stratagème pour l’empêcher de sortir du lit : « Si tu arrives à te libérer en moins d’une minute, je me lèverais et me préparerais, mais si au bout d’une minute tu n’as pas réussi, tu restes au lit toute la journée avec moi, arraseo ?! » Je lui lançais un sourire arrogant, il était dépité. Il réfléchit quelques secondes puis il retrouva le sourire et acquiesça. Il entreprit de me chatouiller de partout, mais bien que je me tortillais dans tous les sens, je ne lâchais pas prise.

« Il va falloir bien plus que ça si tu veux réussir ! » Lui lançais-je impertinemment entre deux fou-rires. Il s’arrêta, souffla un coup, de plus en plus agacé. Il réfléchit, semblant hésiter, me jaugeant du regard. Puis s’exclama :

« Bien, tu l’auras voulu ! »

Et sans prévenir, me prenant de cours, il fonça sur mes lèvres et m’embrassa. Il profita de ma surprise pour me repousser de ses deux mains sur mon torse, brisant le baiser et mon étreinte au passage. Soudainement ma vision devint floue, la chaleur remplit tout mon corps et remonta jusqu’à mes joues devenues rouges pivoine. Mon coeur battait très fort dans ma poitrine et à mes oreilles, si bien que je ne me rendais même pas compte que Luhan avait déjà filé sous la douche, sans un regard en arrière. Il me fallut quelques minutes pour reprendre mes esprits et une fois conscient à nouveau je me levais en vitesse et filais me doucher à l’eau froide espérant ainsi éteindre le feu de mon corps qui brûlait mes pommettes. Je ne prenais même pas la peine d’aller déjeuner ce matin là : j’étais tellement déboussolé que je ne pouvais pas penser à mon estomac dans un moment pareil.

La journée fut une catastrophe : je me trompais dans tous les pas, tombais régulièrement, faisais trébucher les autres, n’arrivais pas à me concentrer si bien que je perdais le fil de la chorégraphie, et ce tout en rougissant à chaque fois que je croisais le regard de mon colocataire. J’avais été tellement inefficace qu’on m’interdit de continuer l’entraînement et me chassa de la salle d’entraînement, me renvoyant au dortoir. Je n’aurais même pas su dire ce que j’avais fait en attendant le retour des autres membres, mais en est-il que j’étais assis dans notre lit quand Luhan revint. Il était apparut timidement à l’embrasure de la porte, comme demandant l’autorisation de rentrer. J’avais eu le temps de me calmer et mes rougissements étaient maintenant presque imperceptibles. Il mit d’abord un pied en avant, et voyant que je ne posais aucune résistance, marcha jusqu’à moi afin de s’asseoir au pied du lit. Il ouvrit la bouche, l’inquiétude et le remord très visibles sur son visage, mais je le coupais avant qu’il ne puisse parler :

« Alors, ça s’est bien passé l’entraînement ? »

Je m’efforçais de paraître détaché, comme si je n’avais jamais été présent de la journée, faisant abstraction de la partie de mon échec pitoyable en danse. Luhan continua aimablement sur ma lancée, comprenant que je préférais ne pas parler de cet évènement humiliant. 

« Oui ça va, Suho est tombé en répétant la pyramide … mais il ne s’est pas fait mal, juste un bleu au genou … »

Il était tout de même hésitant et timide. Je balayais ces sentiments en lui faisant un grand sourire et retrouvant mon enthousiasme habituel.

« Ouf, s’il va bien c’est le plus important alors ! »

Il me rendit mon sourire et parut soulagé. Le soir, nous nous sommes couchés comme à notre habitude, faisant comme si de rien était. Étant celui qui avait rejoins le lit en dernier, c’est moi qui alla me blottir contre lui, lui prouvant encore une fois que tout allait bien.

Mais au réveil, le lendemain, lorsque notre routine habituelle reprit et que je le serais dans mes bras, je senti mon coeur battre plus vite, mes joues se rosirent et je surpris mes lèvres à vouloir que Luhan les embrasse à nouveau. Alors quand il caressa ma joue comme à son habitude, je leva des yeux timides et suppliants à lui, espérant que de lui même il refasse le geste qui m’avait rendu fou la veille.

Il plongea son regard dans le mien et je voyais bien qu’il attendait que j’enlève mes bras de sa taille. J’avala difficilement ma salive. J’avais tellement envie qu’il le fasse à ce moment là. Je ne pouvais pas le lui demander, je n’oserais pas lui demander. Mes yeux firent un aller-retour rapide sur ses lèvres sans que je m’en rende compte, mais de façon suffisamment notable pour qu’il le remarque. Il regarda les mienne, puis me lança un regard interrogateur avant de sourire, comprenant. Il se pencha vers moi et sans que je puisse m’en empêcher, mon menton se releva et mes lèvres se tendirent avides des siennes. Nous échangeâmes un baiser que nous nous donnions mutuellement. Il était bien plus long et plus tendre que celui de la veille, mais cette fois, lorsque nous le rompions, ma vision était claire bien que mon coeur battait à la chamade. Je me surpris à sourire de toutes mes dents. Et Luhan aussi, souriait. Je le laissais se lever sans broncher et l’accompagna du regard jusqu’à la porte.

Sans un mot, un nouvel élément s’était ajouté à notre routine du matin. Et j’aimais beaucoup le baiser du matin avec Luhan, sans savoir vraiment pourquoi, il me rendait heureux.

 

Cependant ce que j’aimais moins c’était le comportement qu’avait adopté les autres membres. Depuis que nous étions dans la même chambre, à chaque fois que l’un de nous deux s’adressait à l’autre ou que nous étions ensemble, les membres se regardaient entre eux ou nous regardaient avec un sourire benêt que je ne comprenais pas. Et quand j’en parlais à Kyungsoo, il se moquait de moi et rigolait sans me donner aucune explication. Un jour où Tao et Baekhyun m’avaient particulièrement énervé, je décidais donc d’en parler avec Jongin qui lui, bien que moqueur en général, savait être sérieux quand je l’étais.

« Kai, pourquoi les garçons nous regardent bizarrement Luhan et moi ? À chaque fois qu’on est ensemble vous rigolez et vous regardez comme des débiles … est-ce que vous vous moquez de nous ? »

Il leva les yeux de son livre et me regarda curieusement. Je m’asseyais sur son lit, à ses pieds, et prenais l’air le plus sérieux possible. Il leva un sourcil et répondit honnêtement :

« On ne se moque pas hyung, c’est juste que vous formez un joli petit couple … vous êtes mignons et tout le monde est heureux pour vous. »

Je ne cru pas bien comprendre d’abord, mais de toute évidence c’était bien ce qu’il avait voulu dire. Je me mis à rougir et me mis sur la défensive. Ma voix devint plus forte et pressante, trahissant ma soudaine panique.

« Mais, on n’est pas un couple, on … on n’est pas ensemble … nous sommes deux garçons … on est juste des amis ! »

Kai leva les sourcils encore plus haut, posa son livre et se redressa sur son assise.

« Que vous soyez deux mec ne veux rien dire … mais si tu dis que vous êtes seulement amis, je te crois, vous faites ce que vous voulez, après tout c’est votre vie. » Je soufflais, rassuré. Puis sa voit devint légèrement plus basse, comme s’il se parlait à lui-même. « Mais c’est dommage … les autres vont être déçues … surtout Chen qui a eu du mal à te persuader qu’il voulait quitter ta chambre pour que Luhan prenne sa place … »

J’étais encore plus choqué et étonné qu’à la première révélation.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? » Balbutiais-je. « Vous … Chen a cherché à faire les entremetteuses ? » M’exclamais-je effaré.

Il haussa les épaules.

« Jongdae, Kyungsoo … Tout le monde voulait vous voir vous mettre ensemble, vous vous entendez si bien, vous allez si bien ensemble ! Et puis Luhan a l’air de tellement tenir à toi … On a juste voulu vous donner un petit coup de pouce. »

Je n’en croyais pas mes oreilles … était-ce un complot ? « Tout le monde » avait-t-il dit ?

« Kyungsoo ? Tout le monde ? Il tien à moi ? Mais … c’est Luhan qui vous a demandé de faire ça ? Qui a demandé à Chen de changer de chambre ? C’est lui ? »

Je balbutiais ces paroles sous le choc mais avec agressivité, mon ton se haussant sans que je le veuille, la tête dans le brouillard de mon incompréhension.

Tout d’un coup Jongin se releva un peu et se précipita de nier, secouant ses mains tendues vers moi comme voulant essuyer un malentendu.

« Non, non, du tout, ça vient de nous ! De nous, je t’assure ! »

Mais son soudain affolement et son expression qui laissait entendre qu’il avait dit une bêtise me fit en déduire que tout cela venait bel et bien de Luhan.

« Je suis désolé Xiumin, je croyais vraiment que vous étiez en couple … » Dit Kai, décidément embêté et comprenant qu’il venait de faire une erreur. Mais ces mots je ne les entendais pas, j’étais choqué, énervé, vexé et me sentais trahis.

Je me levais et sortait de la chambre du danseur sans écouter les mots qu’il lançait dans mon dos. Je retournais dans ma chambre pour y trouver Luhan, en tailleur sur mon lit, jouant sur son portable. Il ne leva même pas la tête, je ne savais même pas s’il avait remarqué mon entrée en trombe.

« Qu’est ce que tu as fait ? » Il leva des yeux curieux vers moi.

« Quoi donc ? » Demanda-t-il avec légèreté d’une voix distraite. En voyant la colère sur mon visage il regretta sa réponse. Je captais aussitôt toute son attention.

« Pourquoi as-tu laissé entendre à tout le groupe qu’on était ensemble ? » Mes yeux lançaient des éclairs. Tandis que les siens étaient inquiets et perdus.

« Je n’est jamais- » Je le coupais avant qu’il ne puisse répondre complètement.

« Pourquoi t’as monté ce stratagème pour être dans ma chambre ?

- De quoi tu parles-

- Pourquoi tu t’es infiltré dans ma vie comme ça ?! D’abord venir me réveiller, ensuite dormir avec moi … »

J’avais du mal à formuler mes idées clairement tandis que la rage montait en moi faisant apparaître des larmes dans les yeux. D’un autre côté le visage de Luhan se décomposait sous l’incompréhension, la surprise et la peur.

« Xiumin je n’ai aucune idée de quoi tu parl-

- Arrête de faire semblant ! Tu fais semblant pas vrai ? » je respirais plus rapidement et me sentais stressé, oppressé, à la limite de la crise de paranoïa. « Le cauchemar, il était faux aussi ? Y a jamais eu de cauchemar, c’est ça ? Ça faisait parti du scénario c’est ça ?

- Non, j’ai vraiment rêvé que tu- »

Il tentait de parler en vain car à chaque fois qu’il essayait de nier je l’interrompais avec de nouvelles accusations. Plus je parlais, plus son doux visage semblait mourir sous mes reproches.

« Pourquoi t’as fait ça ? Pourquoi tu fais ça ? »

Il ne chercha même pas à répondre cette fois-ci tellement le choc le paralysait. Et ça m’énerver encore plus.

« C’est … C’est parce que tu m’aimes ? Tu m’aimes c’est ça ? » Ses yeux s’écarquillèrent et sa bouche s’ouvrit légèrement dans un mélange de peur, de soudain stresse et d’appréhension. « Tu m’aimes, c’est ça ? » Répétais-je sans attendre vraiment de réponse. Il se décomposait encore plus. « Mais qui t’a dit que je t’aimais ? Je t’aime pas ! Je t’aime pas, tu entends ? » Je prononçais ces mots en appuyant dessus sachant pertinemment qu’ils feraient mal. En entendant ceci, de la déception passa sur son visage, brisant mon coeur sur son passage, puis il referma la bouche, fronça les sourcils dans une expression de colère, ses yeux brillant de larmes prêtes à couler. Il se leva avec force et s’approcha dangereusement de moi. Je perdis mon assurance en un battement de cils et recula d’un pas, surpris.

« Redis-le. » 

Il prononça ces mots en serrant les dents, sa mâchoire si crispée que s’en était effrayant. Son regard noir transperçait mes yeux et semblait regarder à travers mon âme. 

« Ose le redire … VAS Y ! » 

Il cria ces mots ce qui me fit sursauter, mais je n’arrivais plus à parler, ma bouche ouverte formant un petit « o ». 

« Dis-le encore une fois, dis que tu ne m’aimes pas. » 

Sa voix imposait une autorité que je ne lui connaissais pas. Aucun son ne sorti de ma bouche, j’étais paralysé alors qu’il avançait à nouveau d’un pas vers moi et que j’en reculais, trébuchant, de deux. 

« Dis que tu ne m’as jamais aimé quand tu as passé du temps avec moi et rigolé avec moi. » 

Je ne faisais que cligner des yeux, ébahis, en réponse à ses mots qui me surprenaient. 

« Dis que tu ne m’as jamais aimé quand tu m’as sourie. Dis que tu ne m’as jamais aimé quand tu m’as pris dans tes bras. Dis que tu ne m’as jamais aimé quand tu m’as serré contre toi. Dis que tu ne m’as jamais aimé quand tu as tenue ma main dans la tienne. » 

À chaque fois sa voix devenait plus forte et plus pressante tandis qu’il faisait un pas de plus vers moi. J’étais à présent contre le mur, bloqué entre mon bureau et ma penderie, incapable de lui échapper. Les larmes coulaient à présent sur ses joues. 

« Dis-moi que tu ne m’as jamais aimé quand on a dormi ensemble ! Dis-moi que tu ne m’as jamais aimé quand tu m’as embrassé ! » 

Cette fois les larmes coulèrent en cascade sur ses joues alors que, soudainement, il se pencha vers moi et levant son bras en ma direction. Je levais mes bras devant mon visage en réflexe, mais c’est à côtés de moi que sa main atterrit, sur le bureau, et je le senti me jeter des dizaines de petits papiers dessus.

« DIS-MOI QUE TU M’AS JAMAIS AIMÉ QUAND JE VENAIS TE RÉVEILLER ! » 

Il avait ramassé ma boîte et me jetait dessus les mots qu’il m’avait écrit tous les matins depuis maintenant près de trois mois. C’était à mon tour d’avoir les yeux écarquillés me sentant percé à jour, comme s’il venait de révéler l’un de mes plus chers secrets. 

« Me dit pas que tu m’as jamais aimé si tu les as gardés ! TOUS, tu les as TOUS gardés ! POURQUOI T’AS FAIT ÇA SI TU M’AIMES PAS ?! »

Sa voix déchirée transperça mes tympans aussi surement qu’elle transperçait mon coeur. Je tentais de parler, de m’expliquer, mais seul des sons incompréhensibles sortaient de ma bouche.

Luhan s’effondra en sanglots, ses jambes le lâchant. Aussitôt Kyungsoo se précipita sur lui pour l’enlacer et le consoler. Je tournais la tête et remarquais seulement maintenant : Jongin, Jongdae, Kris, Sehun et Tao dans l’embrasure de la porte, ayant été témoins de toute la scène. Je n’avais pas remarqué jusque là que le premier m’avait suivit de sa chambre à la mienne et que nos cris avaient alerté les suivants. J’avais les larmes aux yeux et les regardais, le regard suppliant, ne sachant pas quoi faire ni dire. Mais tout ce que j’avais en retour c’était les regards de désapprobation et de déception de mes camarades. Kyungsoo aida Luhan à sortir de la chambre comme on évacuerait un malade, sans même m’accorder un regard. J’eu un réflexe d’essayer de les retenir et fit un pas en avant mais Sehun vint m’en empêcher.

« T’en as assez fait pour aujourd’hui, Minseok. »

Il ne prit même pas la peine d’utiliser la formule de respect que ma posture d’aîné m’octroyait. J’enlevais violemment la main qu’il avait posé sur mon torse et retrouvais mes esprits pour formuler une phrase.

« Ne me dit pas ce que je dois faire, Oh Sehun. »

J’avançais pour rattraper Kyungsoo et Luhan mais cette fois c’est Jongin qui m’en dissuada, plaçant son bras en travers de la porte.

« Tu ferais mieux de le laisser seul un moment. » Sehun quitta la chambre en me bousculant au passage, entraînant avec lui Jongdae, Kris et Tao qui étaient restés silencieux mais avec une expression de tristesse sur le visage. « Sehun a raison, Luhan en a assez eu pour aujourd’hui, il a besoin de reprendre ses esprits et de se reposer … Et je te le redit, il n’a rien à voir avec tout ça, il n’était pas au courant de ce qu’on faisait. » 

J’écoutais mais ne répondais pas, fixant avec tristesse la porte derrière laquelle avait disparu mon petit chinois : la chambre de Kyungsoo.

« Tu ferais mieux d’aller te coucher toi aussi, vous avez tous les deux eu beaucoup d’émotions pour une seule soirée. Puisqu’il dort dans notre chambre ce soir, je viendrait dormir avec toi … Vas te coucher, je te rejoindrais plus tard … »

J’hochais doucement la tête, sentant mon esprit être au ralenti, n’ayant plus la force de renchérir. Je me retournais pour rejoindre mon lit mais tournais immédiatement la tête vers Jongin à nouveau, l’arrêtant avant qu’il ne ferme la porte derrière lui.

« Combien de temps ? 

- Pardon ? » J’avala ma salive avec difficulté avant de répéter.

« Tu as dit que je devais le laisser seul un moment, combien de temps selon toi ? »

Il souffla tristement et me regarda avec pitié, secoua la tête avec désapprobation en regardant le sol, puis me regarda à nouveau.

« Vas te coucher Xiumin, on en reparlera demain … »

Il ferma la porte sans attendre ma réponse. J’alla jusqu’à notre lit et me laissa tomber dessus. Je me surpris à serrer les draps contre moi et les sentir avec avidité cherchant chaque trace de son odeur. Une plainte rugissait dans ma tête et ma poitrine me faisait horriblement mal, quelque part du côté de mon poumons gauche. Je pouvais entendre des pleurs provenant de l’autre côté du couloir et mes yeux me piquaient. Je m’endormie au son des sanglots … les miens.

 

À mon réveil, Kai dormait à mes côtés et personne n’était venu déposer de plateau sur mon bureau. Je n’avais pas besoin de me rappeler pourquoi Luhan n’était pas dans mon lit ni venu m’apporter mon thé matinal. Je n’avais pas eu le droit à l’innocence de la nuit où les rêves vous font oublier vos soucis. Mon sommeil avait été hanté par le souvenir de la veille, si bien que je ne savais pas vraiment si j’avais réussi à dormir ou non, mon esprit étant aussi fatigué qu’après une longue nuit blanche de réflexion.

Je me levais et allais directement jusqu’à la porte de la chambre où Luhan avait passé la nuit en compagnie de Kyungsoo. Je tapais trois coups secs et attendais. D.O vint m’ouvrir mais m’ordonna de retourner dans ma chambre avant de refermer la porte sur mon nez. Je tapais à nouveau mais il ne revint pas m’ouvrir, je tentais une dernière fois, en vain. Alors, je retournais dans notre chambre comme on me l’avait demandé.

Puis à peine habillé et douché, j’étais retourné devant la porte de la chambre de Kyungsoo et Jongin. J’essayais de parler à Luhan à travers la porte, mais il ne répondait pas. Il passait ses journées enfermé dans la chambre et moi les miennes assise devant elle à le supplier de m’excuser et de me laisser entrer. Ce fut ainsi pendant trois jours. Puis, le quatrième jour …

 

« Luhan, s’il te plait, ouvres-moi … ça fait trois jours que t’es enfermé et que tu sors juste pour aller aux toilettes ou te doucher … est-ce que tu manges au moins ? » Aucune réponse.

« Laisses-moi rentrer Lulu … s’il te plait … » Le silence.

« Est-ce que tu me pardonneras un jour ? Je regrette tellement … » Un silence lourd et froid.

« Luhan, pardonne-moi, je t’en supplie, je suis désolé, je … je le pensais pas … je pensais pas ce que j’ai dit … » Un long silence interminable …

Puis soudain, des bruits de pas. Je me relevais à la hate pour faire face à la porte contre laquelle j’étais assis depuis plusieurs heures déjà, et fixais avec appréhension sa poignée. Elle s’abaissa doucement et laissa apparaître derrière elle un Luhan frêle, maigre, blanc, aux yeux gonflés et cernés. Il ouvrit la bouche et sa voix ordinairement mélodieuse était roque et cassée.

« Qu’est ce que tu ne pensais pas ? »

J’étais sous le choc mais tellement heureux qu’il me parle à nouveau que je ne pouvais pas retenir un sourire de s’étirer sur mes lèvres.

« Qu’est ce que tu ne pensais pas ? »

Répéta-t-il, ne souriant pas pour sa part. Je regardais à droite et gauche, quelque peu gêné, espérant que personne ne soit là pour écouter. 

« Euh … et bien … » 

Voyant que je n’étais pas à l’aise d’en parler sur le palier de la porte, il souffla puis me fit signe d’entrer. Je m’exécutais et il referma la porte derrière moi. 

La lumière était tamisée et l’humidificateur d’air était allumé, on aurait dit une chambre de malade. Luhan alla directement se réfugier dans le lit, comme un système de défense. Je le rejoins et m’asseye au bord de celui-ci. Je lève les yeux sur lui et remarque malgré sa tête baissée qu’il a les larmes aux yeux, ce qui me donne automatiquement envie de pleurer également. 

Je me lève et remonte le lit jusqu’à lui. D’une main je lui relève le menton pour voir des larmes couler doucement de ses yeux bouffis. D’un geste de la tête il se dégage de mon emprise et baisse le regard sur son nombril, honteux. 

Je n’écoute pas ses plaintes de désaccord et m’installe dans le lit à ses cotés. J’hésite une fraction de seconde puis l’attire contre moi et le serre dans mes bras, le laissant pleurer sur mon épaule. Je pris une grande respiration pour me donner du courage avant de parler.

« Je suis désolé … Je le pensais pas, de tout ce que je t’ai dit il n’y a rien qui soit vrai ou que je pense. J’ai paniqué quand Jongin m’a dit que tout le monde croyait qu’on était en couple. Je n’étais pas prêt … j’ai juste paniqué. Et je m’en suis pris à toi alors que tu étais la dernière personne que j’aurais voulut voir souffrir … J’ai été stupide et j’ai dit des choses que je pensais pas. » Ma gorge se serra automatiquement essayant de m’empêcher de prononcer ces mots. Mais je la combattais tant bien que mal sachant qu’il était vitale que je les dise. « Je le pensais pas quand … quand j’ai dit que je … que je t’aimais pas. » Mon coeur battait à la chamade de peur d’être rejeté, de peur que ce ne soit trop tard. De son côté je sentais le corps de Luhan en tension, il avait arrêté de pleuré mais n’avait pas bougé comme s’il avait peur de briser un charme. Il s’agrippait fermement à mon t-shirt en attendant que je continue. « Luhan je … Je veux pas te voir souffrir, je tiens trop à toi … Je tiens à toi plus que quiconque Lulu … Je t- » Mais les mots restèrent bloqués dans ma gorge … satanée gorge ! Il releva doucement la tête pour laisser apparaître ses petits yeux écarquillés et mouillés. J’avalais difficilement ma salive et plongeais mon regard dans le sien. Et alors, doucement, je me penchais vers lui avec hésitation et appréhension, choisissant de lui exprimer les mots que je n’arrivais pas à dire par une action. Une action simple que j’avais déjà faite tous les matins pendant des semaines, mais pourtant dure à exécuter. Mon coeur battait à la chamade vibrant dans mes oreilles. Ma cage thoracique semblait sur le point d’exploser, se soulevant de plus en plus vite, me faisant agréablement mal. Je me penchais un peu plus tandis qu’il restait immobile, rougissant un peu plus à chaque centimètre que je parcourais vers lui. Je finissais de parcourir les derniers centimètres en fermant les yeux et laissant mes lèvres se déposer sur les siennes. J’ouvris les yeux sans briser le baiser observant les joues roses de Luhan et ces petits yeux clos avec force mais enfin secs. Alors j’attrapa son visage entre mes mains et commença à embrasser ses lèvres un peu plus, les capturant entre les miennes, essayant d’exprimer mes sentiments à travers elles. Il finit par détendre ses muscles et me rendre mon baiser. Nous n’avions jamais échangé un tel baiser. C’était un baiser que l’on échange avec sa moitié, avec la personne qui partage notre vie, la personne que l’on aime. J’avais déjà embrassé de cette façon, mais ce que je ressentais à l’instant n’était rien en comparaison avec ce que j’avais ressenti auparavant. Ma poitrine vibrait tandis que nos lèvres ne s’arrêtaient plus de s’embrasser. La chaleur avait emplie mon corps et le désir montait dans mes lèvres, mon entre-jambe en passant par mes doigts de pieds et le bout de mes doigts qui agrippaient sa nuque. Ma langue s’aventura jusqu’à l’embrasure de ses lèvres, demandant timidement l’autorisation de rentrer dans sa bouche. Une autorisation qu’il me donna immédiatement, m’accueillant avec sa propre langue qui venait chercher la mienne avec fougue pour l’entraîner dans une danse effrénée. Quand le besoin de respirer se fit ressentir, nous brisâmes un instant le baiser pour repartir de plus belle. Je pressais mes lèvres avec force sur les siennes tout en sentant de grosse larmes chaudes couler les long de mes joues et soudainement ma gorge et ma langue se dénouèrent et je pu parler à nouveau, déferlant des paroles contre ses lèvres :

« Je t’aime. Je t’aime. Je t’aime tellement. Pardonne moi. Je t’aime. »

Je ne m’arrêtais plus de lui dire tous les mots qui avaient étaient coincés aux portes de mes dents serrées depuis trop longtemps. Je continuais à l’embrasser avec toute l’ardeur que j’avais tout en prononçant des « Je t’aime » et des « je suis désolé » sur sa bouche comme voulant les imprégner de mes paroles, les marquer au fer rouge de mon amour.

« Ça va, tout va bien, je te pardonne. Ce n’est rien. C’est fini. »

Luhan tentait de me calmer, prononçant ces paroles apaisantes entre les baisers que je lui donnais. Puis il m’attrapa le visage avec force entre ses deux mains et me sépara de lui afin de plonger son regard dans le mien.

« Tout va bien, je t’aime et je te pardonne … d’accord ? »

J’acquiesçais tendis qu’il essuyait mes larmes du coin de sa manche. Il se pencha pour déposer un dernier chaste baiser sur mes lèvres avant de m’inviter à me lever. Nous sortîmes de la chambre nous tenant par la main, Luhan m’entraînant derrière lui avec confiance, un petit sourire bienveillant sur le visage. Nous croisâmes les regards curieux de plusieurs membres sur notre passage mais je ne le remarquais même pas, mes yeux comme vissés sur celui qui me guidait. Nous rejoignîmes notre chambre que Kai avait apparemment quittée plutôt. Luhan me fit m’asseoir sur le lit et se mit debout devant moi.

« Ne dors plus jamais avec un autre que moi. N’embrasse jamais un autre que moi sur la bouche. Ne laisse personne d’autre que moi t’appeler Baozi. Ne te douche avec personne d’autre que moi. Je veux que tu penses à moi à chaque seconde, chaque minute de la journée. Je veux te manquer à chaque fois que je ne serais pas en ta compagnie. Je veux que tu me fasse passer avant, que tu te soucies de moi, de comment je vais, de si je mange bien … Je veux que tu m’achètes à manger, qu’on aille faire les boutiques ensemble et qu’on sorte ensemble. Je veux toutes les choses qu’un couple normal font. Je veux pouvoir le dire aux autres membres, pouvoir dire que tu es mon petit-ami sans honte et sans que tu en aies honte non plus. Et je veux que tu m’aimes. Que tu m’aimes tous les jours, toutes les nuits, toutes les secondes de ta vie. Tu ne dois pas un instant cesser de m’aimer même si l’on se dispute ou que l’on est en colère l’un contre l’autre … Brises une seule de ces règles et tu es un homme mort Kim Minseok. »

Il avait prononcé tout cela d’un ton stricte et serein tout en me regardant dans les yeux. Son regard sévère m’avait obligé à écouté avec soin chacune de ses paroles.

« Aucune objection ? »

Je réfléchissais un moment tête baissée, analysant ce qu’il avait dit, puis je relevais les yeux vers lui et hochais la tête négativement avec assurance.

« Alors embrasse moi encore. »

Je retrouvais le sourire et me relevais, me précipitant pour prendre son visage entre mes mains et lui donner le baiser qu’il m’avait réclamé.

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Comments

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choiTaeHee
#1
aaaaaaaaaaaaah c'est la 1er fois que je lis une nouvelle en français :)
buzzchan
#2
Chapter 1: J'aime beaucoup :)
Xiuhan est trop mimi