Chapitre 7

Le Moulin Bleu

Chapitre 7 :

 

Byunghun était ce matin d’une humeur massacrante. Il avait terriblement mal dormi, et son corps était entièrement courbaturé à cause de son travail de la veille. Il avait ensuite dû boire son café matinal froid car la machine de son ami l’avait lâché en cours de route. Et pour couronner le tout il avait été forcé de prendre le bus car sa moto avait refusée de démarrer.  Il s’assit devant son bureau et rattrapa sa nuit de sommeil pendant les cours de la matinée.

Quelques heures plus tard, la sonnerie de midi retentit et il reçut une violente tape sur la tête. Se relevant d’un bond, il se retourna vivement pour savoir à qui il allait faire regretter ce réveil douloureux. Il soupira quand il s’aperçut que c’était son ami d’enfance Changjo.  Ce dernier se tordit de rire en voyant la trace de ses cahiers imprimés sur la joue de son ami.

      -  Mec sérieux t’as une tête de mort-vivant, fit remarquer Changjo, t’as fait la teuf ou quoi hier soir ?!

L.joe lui répondit par un regard qui en disait long sur son envie de développer le sujet. Changjo habitué par les sautes d’humeur de son ami ria, puis passa son bras autour de ses épaules pour l’emmener jusqu’au self.

Ils s’installèrent à leur table habituelle où les attendaient déjà leur bande d’ami. Elle se composait  de 5 personnes, eux compris. Les trois autres membres étaient Chunji, Ricky, et Niel. Ils se connaissaient tous depuis le jardin d’enfance, et les revenus de leur parents dépassaient pour tous largement le salaire moyen de la population coréenne. Pour faire simple, ils avaient été réunis par l’argent, mais cela ne les avait pas empêchés de développer une réelle amitié.

Pendant le repas, Byunghun passa plus de temps à touiller dans sa nourriture du bout de ses couverts plutôt qu’à manger réellement. Il n’avait pas faim et les chahutages de ses amis lui causaient un mal de crâne.  

Il finit par mettre ses écouteurs et s’enferma dans sa musique. Il laissait son regard divaguer sur la bruyante salle de restauration quand il l’aperçut. La fille du garage. HyoRin ? Hye Ran ? Il ne se souvenait plus. Elle aussi chahutait avec ses amies.

     « Je suis sure qu’elle va tous leur cafter, pensa L.joe,  et je serais obligé de changer de pays pour sauver ma réputation entachée. »

La fille et ses copines rigolaient de plus en plus fort et l’anxiété de Byunghun montait en conséquent. Il fit courir sa paume sur son visage. Il n’aurait jamais dû lui faire confiance. Soudain, le regard de la lycéenne croisa le sien. Cette dernière leva les sourcils de façon impertinente. Puis quelques secondes plus tard, toute sa tablée s’était retournée et regardait en sa direction en pouffant bêtement. Cette fois, il en était sûr, elle leur avait tout dit. C’en était trop, il fallait qu’il aille la voir, elle n’allait pas s’en tirer comme ça.

      -  Salut ! fit une voix devant lui.

Plongé dans ses pensées, il n’avait même par remarquer que quelqu’un se tenait en face de lui. Il retira ses écouteurs, et n’entendait plus ses amis. En effet ils étaient tous tournés vers cette personne, la bouche béante. Il leva les yeux vers la personne en question, qui s’avéra être une fille de son âge.

        « Merde, elle est jolie… » Pensa le jeune homme en posant ses yeux sur elle. Elle était mince, et ses longs cheveux châtains clairs encadraient son joli visage.

      -  Tu es L.joe, n’est-ce pas ? demanda-t-elle.

Il acquiesça distraitement. Il vit que la fille du garage accompagnée de ses amies se levait, puis sortit du self non sans lui jeter un dernier regard hautain. Les nerfs du garçon bouillonnaient. Un raclement de gorge le ramena à la réalité.

    -  Et moi c’est Juyeon, continua la demoiselle, visiblement vexée.

    -  Ok cool, répondit simplement Byunghun, contenant sa frustration.

La dite Juyeon devint écarlate. Un blanc s’installa. Ses amis émirent un rire gêné.

     -  L.joe à plutôt un caractère lunatique, éclaircit Chunji, ce n’est pas contre vous Juyeon-sshi.

     -   Oui c’est vrai, affirma Changjo en secouant les mains, vous voulez vous asseoir ?

La jeune fille les ignora, et choisit de ne pas se laisser démonter par ce prétentieux Byunghun.

     -  J’ai beaucoup entendu parler de vous, insista-t-elle. Il paraît que vous êtes un élève brillant. C’est pour ça que j’ai choisi de venir dans cette école. J’aimerais beaucoup en apprendre plus sur vous.

Byunghun, porta enfin son attention sur Juyeon. Etait-elle vraiment venue pour lui ? Il est vrai qu’il était plutôt du genre brillant, mais ses nombreuses absences ne le définissaient pas vraiment comme un élève exemplaire.

La jeune fille sortit un papier de son sac à main et le posa devant lui.

      -   Si vous souhaitez discuter, dit-elle avec un sourire en coin.

Puis elle tourna les talons, ne laissant derrière elle que l’effluve de son parfum fleuri. Dès qu’elle fut loin, ses amis se mirent à agir comme des adolescents attardés en l’imitant.

      -  J’aimerais beaucoup mieux vous connaître Byunghun-sshi, fit Ricky d’une voix efféminée.

L.joe lui répondit par un regard qui avait l’air de dire « encore une remarque comme celle-là et tu y passes ». L’ignorant, ses amis se jetèrent comme des primitifs sur le papier sur lequel était imprimé le numéro de Juyeon.

     - Tu vas l’appeler ? demanda Niel

Byunghun haussa les épaules et ramassa ses affaires. Il avait pour l’instant d’autres affaires à régler.

 

***

 

Je m’installais à table avec mes amies. Elles étaient particulièrement en forme aujourd’hui, et je ne pouvais m’empêcher d’imaginer leur tête si je leur annonçais mon aventure d’hier. Heureusement, elles avaient aujourd’hui un autre sujet de conversation que Lee Byunghun, ce qui me rendait la tâche plus facile. Je ne lui devais rien, et rien ne m’empêchait moralement de tout dévoiler, mais je n’étais pas non plus du genre à chercher des ennuis.

Sojung et Sora étaient lancées dans le récit de leur double rencart de la veille. Il ne s’était apparemment pas bien passé puisque le prétendant de Sojung mangeait comme un porc tandis que celui de Sora avait l’alcool facile.

     -   Au final, on leur a dit qu’on allait aux toilettes, mais on n’est jamais revenue ! avoua Sora

Nous rîmes aux éclats devant leurs têtes dépitées. Je finissais mon repas quand je sentis un regard sur moi. Je scrutais la salle, et surpris L.joe en train de me fixer. J’arquais un sourcil. Qu’est-ce qu’il me voulait celui-là ?

      -  Youhou HyeRin t’es toujours avec nous ? entendis-je la voix de Sojung.

      - Euh, oui oui, répondit-je, revenant à la réalité.

      - Qui tu regardes ? demanda Minah

Mes amies suivirent mon regard, se retournèrent, et virent L.joe. Elles pouffèrent.

      -  L.joe hein ? On croyait qu’il n’était pas ton genre ?

      - Il est pas mon genre, tranchais-je.

Elles me regardèrent d’un air peu convaincu. J’aurais dû être plus discrète.

     - Allons-y, dis-je pour faire diversion.

Je pris mon plateau et me levait. Elles en firent de même, non sans continuer à me questionner. Je lui jetais un dernier regard avant de sortir du self, et vis qu’il était en train de parler avec une fille. J’eu une envie démangeante de lui tirer la langue, mais me contentais de le regarder d’un air hautain.

 

La fin des cours sonna, et comme à mon habitude je marchais jusqu’au garage accompagnée de Pyo. En arrivant, je vis que Minhyuk nous attendait sur le porche. Il avait un air grave.

      -  Le Moulin Bleu à appeler, me prévint-il

Je me figeais un instant.

      - Alors ?... fis-je d’une voix étranglée.

Il secoua la tête. La réponse était négative. Mon moral en prit un coup. Pyo me tapota le dos.

     - C’est pas grave Rin-Rin, vous serez pris autre part.

J’haussais les épaules. J’aurais vraiment aimé travailler au Moulin Bleu.

     - Je vais me changer, dis-je.

Je m’enfermais dans les vestiaires. Je posais mon sac, et me regardait dans le miroir.

     «  Reprend toi ma vieille, pensais-je, t’as cru que ça allait être aussi simple ? »

J’inspirais longuement, puis repris mes esprits. Tant pis pour eux après tout.  Nous trouverons autre chose.  J’enlevais mon uniforme et enfilais un débardeur noir avec un short en jean, avant de relacer mes converses. Je relevais mes cheveux en un chignon désordonné, ainsi ils ne me gêneraient pas durant mon travail. Je rangeais ensuite mes affaires dans mon casier et sortit travailler.

Déjà une heure et demi était passée, et toujours pas une trace de L.joe.

«   J’en étais sûre, un jour de travail et monsieur se dégonfle » pensais-je.

Je faisais la révision de la voiture d’une dame de la quarantaine.

     - Votre réservoir d’huile à frein à fuité, lui expliquais-je

     - C’est grave ? demanda-t-elle, l’air paniqué.

Je refermais son capot et m’essuyais les mains avec un torchon.

     - Ce n’est rien à réparer mais ça peut être très dangereux, vous avez bien fait de nous l’emmener. Nous allons devoir garder votre voiture, mon collègue va vous confier une voiture de remplacement pendant la réparation.

Je la guidais jusqu’à Sungjin quand un bruit de moteur retentit dans l’allée. Je me retournais et il me fallut moins de deux secondes pour identifier de propriétaire de cette énorme moto. Je m’excusais auprès de ma cliente et me dirigeais, furibonde vers le nouvel arrivant.

Je me plantais à côté de sa bécane pendant qu’il descendait. Il enleva son casque nonchalamment et me regarda d’un air ennuyé. 

     - Quoi ? Fit-il

     - Quoi ?! Répétais-je, tu sais quelle heure il est ?

Il soupira et jeta un œil à sa montre.

     - 19h30 ?

     - Exact, répondis-je, nous sommes censé arriver au garage à 18h. Je te laisse faire le calcul.

Il leva les yeux au ciel. Ce garçon me mettait hors de moi.

 « Calme toi, calme toi » me dis-je. Je savais que ça ne changerait rien, que je m’énerve ou non. Je pointais vers les vestiaires.

     - Va te changer.

Il me jeta un regard noir, avant de disparaitre. Je n’arrivais pas à croire qu’il soit revenu. N’avait-il pas eu sa dose le jour dernier ? Que cherchait-il à prouver en venant ici ?

Je demandais à Sungjin de s’occuper de lui aujourd’hui aussi, je n’avais définitivement pas le courage de le supporter.

***

Byunghun s’assied dans les vestiaires, et checkait ses sms. Il n’avait pas le moral à travailler ce soir. Pourtant, à peine une minute plus tard, son nouveau collègue Sungjin vint le chercher. Il lui tendit une serpillière et un seau.

     - Tiens, je pense que tu sais t’en servir. Commence par le petit atelier. Si tu as besoin de quelque chose, je suis sur le parvis.

Sérieusement ? Il allait vraiment devoir passer la serpillière ? C’était la chose la plus affligeante qu’on lui ait demandé de faire, aussi loin qu’il pouvait remonter dans ses souvenirs. Son égo entaché, il se traina jusqu’à la petite pièce. Il détestait déjà ce travail. De tout son cœur. Mais il n’avait pas le choix pour l’instant, son père n’avait pas cédé et son ami lui avait posé un ultimatum. Il refusait d’abandonner et d’obéir à son père, alors il devait tenir.

Il trempa le balais serpillière dans le seau, et commença à nettoyer. C’était la première fois de sa vie qu’il le faisait, mais ça ne devait pas être si sorcier. Il eut fini au bout d’une dizaine de minutes, et sortit pour s’attaquer au grand atelier. Il vit la fille qui discutait avec l’employé avec lequel il n’avait jamais parlé.

     - Tu as faim ? lui demanda-t-il

     - Un petit peu, répondit-elle en se frottant le ventre.

     - Je vais acheter quelque chose à grignoter tant qu’il n’y a pas de clients, dit-il en lui ébouriffant les cheveux.

Elle acquiesça puis se remit au travail. «  Ils sortent ensemble ? » se demanda Byunghun. Il haussa les épaules. Après tout il s’en fichait, mais ce Minhyuk s’y croyait beaucoup trop à son goût.

Il passa la serpillière dans la grande salle. Hyerin était penchée au-dessus d’un capot, et semblait démonter quelque chose. Elle vit que L.joe se rapprochait, mais l’ignora. Un blanc s’était installé, et seuls les bruits des outils retentissaient, faisant écho dans la grande salle. Il finit par briser le silence.

     - Je sais que tu leur as dit.

Elle le regarda d’un air étonné.

     - De quoi tu parles ?

« Ben voyons, elle feins l’innocence en plus. » pensa Byunghun.

     - Je t’ai vu à midi, ne mens pas.

Hye Rin ne voyait sincèrement pas de quoi il parlait, et tenta de se rappeler de la scène de ce midi. Puis elle comprit.

     - Ah, fit-elle, tu crois  que j’ai raconté à tout le monde que tu travaillais ici ?

Byunghun hocha la tête.

     - Non, je ne le crois pas, je le sais. Je t’ai vu rire toi et tes amies retardées.

La jeune fille eu un sourire en coin qui agaça L.joe. Elle s’arrêta de faire ce qu’elle était en train de faire et retira ses gants de travail.

     - Dis-moi, commença-t-elle, est ce que tu es toujours comme ça ?

     - Comme quoi ? dit-il, agacé.

     - Tu crois que tu es le centre du monde et que tout tourne toujours autour de toi ?

L.joe se tut. Elle venait de lui clouer le bec. Alors elle n’avait rien dit ? Il s’apprêtait à répliquer quand ils furent interrompus.

     - Il y avait des promotions sur les Pringles !

Hye Rin détourna son attention sur son ami et son visage s’éclaira. L.joe s’éloigna discrètement. Ces gens l’agaçaient profondément. Il en fallait vraiment peu aux gens pauvres pour qu’ils soient heureux. Il regarda la jeune fille se jeter sur son collègue pour lui arracher ses sacs plastiques pour plonger ses mains à l’intérieur de l’un deux et sortir triomphalement une boite jaune, puis celui-ci lui reprendre le paquet de ses mains, avant de lever la boite assez haut pour la rendre hors de portée. Byunghun leva les yeux au ciel avant de s’éloigner de plus belle pour échapper à leur chahutages intempestifs. Il ne supportait les gens bruyants.

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Comments

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HanNah28
#1
Omg-- enfin une fic en français!! J'ai cru que je n'en croiserai aucune ici!
naeyah #2
Oh mon dieu un lecteur *_*
Merci à toi, j'espere que la suite te plaieras :D